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Responsabilité Sociale Des Entreprises Et Lobbying :

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Pages 39
Responsabilité sociale des entreprises et lobbying :

Quelle éthique pour quels enjeux dans les cabinets de conseil en lobbying?

Richard MAJOR

Chercheur au CERGAM à l’IAE d’Aix en Provence et consultant en management

Madina RIVAL

Maître de conférences au Cnam Paris et chercheur au LIRSA

Remerciements : Les auteurs remercient Frédérique Déjean pour son apport à cette communication, notamment lors du recueil de certaines données.

Résumé :

En France, le conseil en lobbying est une activité à la fois récente et mal perçue, contrairement à ce qui se pratique aux États-Unis. Il est vrai que l’influence de la décision publique est une profession particulièrement sensible, tant sur le plan managérial que sur le plan sociétal. C’est pourquoi l’éthique (comprise dans son sens général comme la morale appliquée aux affaires) peut y jouer un rôle central. Cette communication s’interroge sur les pratiques et les enjeux de l’éthique dans le conseil en lobbying.

Le terrain privilégié dans cette étude exploratoire du sujet est la France. Le cas d’un cabinet de conseil en lobbying est plus particulièrement développé, fruit d’une observation participante de trois mois. Il est complété par des données secondaires sur la profession en France et aux États Unis ainsi que sur les institutions françaises, européennes, américaines et québécoises.

Les résultats de cette recherche sont développés autour de deux axes :

1. La pratique de l’éthique du lobbying diffère suivant l’âge et le degré d’institutionnalisation de la profession dans le pays ; en particulier en France on observe une éthique informelle au faible potentiel régulatoire et basée essentiellement sur l’exemplarité.

2. Les enjeux de l’éthique sont à la fois une structuration interne de la profession de conseil en lobbying mais également en externe une clarification des relations entre ces organisations et leurs différentes parties prenantes (notamment les clients, l’État et la société civile).

Ce sujet suggère des opportunités de recherche future sur les principes et les procédures éthiques appliqués au lobbying, comme instrument de légitimation et de diffusion de bonnes pratiques, dans le cadre du développement de la responsabilité sociale des entreprises.

Mots clés : Conseil en management, Éthique, Lobbying, RSE

Abstract:

In France, lobbying consulting is at the same time a recent and not well received activity, conversely to the United States. The influence of public decision making is certainly a particularly sensitive occupation, at both managerial and societal levels. This is why ethics as applied to business can play a central role in its establishment. This paper examines the practices and issues of ethics in lobbying consulting.

The chosen field in this exploratory study is France. The case of a lobbying consultancy firm is more specifically developed. A three month participant observation research is complemented by secondary data on the profession in France and in the United States, as well as on French, European, American and Quebec institutions. The results of this research are developed along two lines:

1. The practice of lobbying ethics differs according to age and degree of institutionalization of the profession in the country. In France ethics is informal and based primarily on exemplary, with a particularly low regulatory potential.

2. The stakes of ethics are both internal to the lobbying consulting profession, in its structuring from an emerging to an established profession, as well as external in the clarifying of its relationship with its stakeholders including customers, government and the civil society.

Key words: Ethics, lobbying, management consulting

INTRODUCTION
« Booze, Blonds and bribes »… Le lobbying se peut-il se réduire à des boissons, des blondes et des pots-de-vin… ? Aux États-Unis, l’organisation non gouvernementale Opensecrets révèle que « au delà de leurs contributions aux campagnes politiques, les entreprises, syndicats et autres organisations, ont dépensé 2,45 milliards de dollars en 2011 pour le lobbying du Congrès et des agences fédérales ». Selon les statistiques du site opensecret.org, entre l’an 2000 et 2011, le nombre des clients représentés par des lobbyistes a augmenté de 59 %, passant de 7034 à 11164. En Europe, au cours du mois de mars 2011, deux journalistes se faisant passer pour des lobbyistes ont piégé des eurodéputés en leur proposant des sommes d’argent pour déposer des amendements. Au même moment, en France, Transparence International France, association spécialisée dans la lutte anti-corruption, accusait le lobbying à l’Assemblée Nationale française de manquer de transparence [1]… L’influence des intérêts privés sur la décision publique, puisque c’est de cela qu’il s’agit, fait décidément couler beaucoup d’encre !

Le mot « lobby » a été utilisé pour la première fois aux États-Unis par le général Grant qui, suite à l’incendie de la Maison Blanche, s’était installé dans un hôtel dont le rez-de-chaussée (« lobby ») était envahi par des groupes de pressions. Les termes « lobby agents » apparaissent finalement aux États-Unis en 1823 pour désigner les personnes qui fréquentent les corridors du Congrès américain afin d’influencer ses membres. Aujourd’hui, à l’instar de Farnel (1993), nous définirons le lobbying (ou « influençage ») comme « une activité qui consiste à procéder à des interventions destinées à influencer directement ou indirectement les processus d’élaboration, d’application ou d’interprétation de mesures législatives, normes, règlements et plus généralement, de toute intervention ou décision des pouvoirs publics » p. 174. Les pratiques de lobbying en France sont à considérer à ce stade comme expressions informelles d’une profession émergeante au sein d’une société développée, alors que dans les pays anglo-saxons ces pratiques sont reconnues comme un élément à part entière de la responsabilité sociale des entreprises.
Qui sont ces lobbyistes ? De manière générale, on distingue deux grands types de groupes de pression extérieurs à l’État : les organisations professionnelles (les entreprises mais également des formes d’action collective plus ou moins structurées comme les associations professionnelles) et les groupes de pression sociaux (par exemple les syndicats de salariés, les groupes de défense des consommateurs, les écologistes,…). Ce lobbying peut être effectué avec des ressources internes ou délégué à des cabinets de conseil externes qui seront plus particulièrement étudiés dans cette communication. En effet, le recours à un cabinet de conseil externe permet l’accès à des lobbyistes d’expérience à moindre coût. En revanche, il pose des problèmes d’éthique encore plus aigus en raison de la délégation des intérêts concédée (ou problème d’agence pour reprendre les termes de Jensen et Meckling, 1976). Pour ces consultants, la pratique du lobbying est confrontée quotidiennement à la question de l’éthique, ne serait ce qu’au regard de la confidentialité des informations qu’ils détiennent sur leur client. De manière plus générale, les notions de justice, responsabilité sociale, exemplarité, confiance mutuelle, respect des autres définies par Ricoeur (1988) semblent peu compatibles avec les faits d’armes des lobbyistes dont nous abreuvent les médias. De multiples affaires de corruption et de trafic d’influence ont été révélées ou devinées mais elles masquent une autre réalité : l’influence de l’entreprise peut en fait être exercée de manière éthique et responsable. Il s’agit pour le lobbyiste non seulement d’être en conformité avec la loi mais également de contribuer à instaurer des règles de bonne pratique et de s’interroger sur les conséquences pour les autres parties prenantes des intérêts défendus.

L’interrogation centrale sur le sujet est la suivante : dans quelle mesure les acteurs français de la profession de conseil en lobbying adoptent-ils des pratiques éthiques ? Cette problématique sera déclinée dans la présente recherche en deux sous questions :
Q1 : Quelles pratiques éthiques peuvent être caractérisées ?
Q2 : Quels sont les enjeux de ces pratiques ?
Cette communication est composée classiquement d’une revue de la littérature sur les relations entre éthique et lobbying, de la présentation de la méthode qualitative exploratoire et du terrain français choisis, des résultats décrivant les pratiques de l’éthique dans les cabinets de lobbying ainsi que leurs enjeux en termes de structuration de la profession et des relations avec les parties prenantes.

1. REVUE DE LA LITTÉRATURE : ÉTHIQUE ET LOBBYING, « LES LIAISONS DANGEREUSES »

1. Le lobbying : une profession émergente qui se cherche une éthique

Le lobbying est une activité qui se structure à peine en France alors qu’elle est historiquement beaucoup plus établie dans les pays anglo-saxons (Rival, 2006). Accusée de nuire à l’intérêt général notamment par la capture de rente, cette activité est à la recherche d’une éthique.

1. Le lobbying, une profession récente en Europe
Les États-Unis sont considérés comme le berceau du lobbying, de ses origines au XIXème siècle jusqu’à son extension à de nombreuses entreprises dans les années 1970, années durant lesquelles l’activité politique des entreprises américaines s’accroît considérablement au niveau fédéral. Cette mobilisation sans précédent ne fera que s’amplifier par la suite.
Les chiffres du lobbying sont disponibles de manière très transparente aux États-Unis (voir par exemple le site opensecrets.org). Aujourd’hui, le lobbying concerne aux plus de 40 000 acteurs directs, surtout basés à Washington, qui doivent être enregistrés et se soumettre à la réglementation en la matière (« Foreign Registrations Act », 1936 ; « Federal Registration Act », 1946) (Ansolabehere, De Figueiredo, Snyder, 2003). Par ailleurs, les campagnes sont financées par les entreprises au travers des PAC (Political Action Committees) sur lesquelles il est possible d’obtenir des données détaillées (Bombardini et Trebbi, 2011). De manière plus directe, la Disclosure law de 1995 rend obligatoire la transparence sur les sommes dépensées et leur destination en matière de lobbying. Enfin, un certain nombre d’autorités (comparables aux autorités administratives indépendantes françaises, comme par exemple la Federal Communications Commission) disposent de données très précises sur les groupes d’intérêts et les sommes dépensées (De Figueiredo, Kim, 2004).
Certaines études (comme celle de Levitt, 1995, sur le lien entre les contributions financières aux campagnes et les modifications des votes à la Chambre des représentants et au Sénat) ne constatent pas l’existence d’une relation empirique entre lobbying et décision publique. Cependant, la majorité des recherches mettent en évidence une influence de l’action politique sur sa cible. Ainsi, Hall et Wayman (1990), ont étudié trois problématiques soumises au Congrès américain dans les années 1980[2]. Ils démontrent que les intérêts financiers influencent notablement le processus législatif. En particulier, les membres des commissions sont sensibles aux demandes des groupes de pression, même s’ils n’appartiennent pas à leur circonscription. De même, Wright (1990) analyse les votes de commissions du 99ième Congrès américain par l’interview des élus ainsi que par des questionnaires envoyés aux lobbyistes. Il souligne que les décisions de vote des élus dépendent des efforts des groupes d’intérêt. Par ailleurs, Romer et Snyder (1994), étudient la pression exercée par les lobbyistes sur les membres des commissions de la Chambre américaine des représentants par l’intermédiaire du financement des campagnes électorales de 1980 à 1988. Ils constatent bien l’existence d’un lien entre les célèbres PAC américains et les décisions des dites commissions.

En Europe, le dictionnaire historique de la langue française atteste de l’apparition du mot « lobby » au XIXième siècle, en 1843 dans la Revue des deux Mondes puis en 1857 dans la Revue Britannique concernant et décrivant une réalité américaine. Ce n’est qu’en 1952 que le mot est acclimaté à propos d’une pratique française comparable, d’abord en milieu parlementaire puis dans d’autres milieux influents (notamment les organes de presse).
Depuis cette date, la pratique du lobbying par les entreprises européennes a bien évolué. En premier lieu, la mondialisation des activités économiques s’est accompagnée d’une intensification de la concurrence et d’une « juridicisation » des rapports économiques et sociaux (à tel point que Carbonnier (1996) parle en France d'une « passion du droit »). De nouvelles contraintes apparaissent pour les entreprises qui peuvent tenter de les surmonter en recherchant des avantages concurrentiels, par exemple par l’intermédiaire du lobbying. Par ailleurs, l’existence d’un mouvement de décentralisation (ou transfert des compétences de l’État aux collectivités locales) dans un certain nombre de pays européens constitue une source d’opportunités supplémentaires pour les lobbyistes. On en voudra pour preuve le cas de la Grande-Bretagne, où, après que l’autonomie ait été donnée à l’Écosse et au Pays de Galles, les grands cabinets de lobbying londoniens ont créé des filiales dans ces régions (Le Picard, Adler et Bouvier, 2000). Enfin, l’unification européenne implique un transfert des centres décisionnels et donc de nouvelles opportunités pour les entreprises lobbyistes (Jean, 1992). A ce titre, la mise en place du marché unique en 1986 marque un tournant. C’est ainsi que, en France, les cabinets de lobbying commencent à acquérir une reconnaissance professionnelle à la fin des années 1980.

2. Éthique et lobbying : Des enjeux sociétaux et managériaux
Sur un plan économique et social, plusieurs critiques d’ordre général pèsent sur les groupes de pression. Ils travailleraient dans l’ombre et occulteraient les débats. En outre, leur action pourrait cacher une exacerbation des corporatismes qui rend les choix plus difficiles et moins soucieux de l’intérêt collectif. Enfin, la multiplication des groupes de pression serait une source de conservatisme et de statu quo plutôt que de progrès. Ces dernières années, un effet négatif des groupes de pression a été souligné : la hausse des dépenses publiques et le fléchissement des taux de croissance. Par exemple, pour Olson (1978), on peut expliquer les rythmes de la croissance des dépenses publiques par la place plus ou moins importante des groupes de pression. Les groupes de pression se constitueraient et s’organiseraient pour obtenir des transferts à leur profit, ce qui débouche sur l’alourdissement des dépenses mises au budget de l’État. Le lobbying ne serait-il qu’une activité de recherche de rentes ? (Stigler, 1975).
Il existe des études qui affirment que le lobbying peut être certes générateur de coûts mais aussi de bénéfices sociaux ; un niveau de coût optimal existerait (Lee, 1985). Par exemple, une entreprise privée pourra se révéler plus compétitive que l’État pour la production de l’électricité. Lee (1985) estime ainsi que seul un quart des activités de recherche de rente se traduisent par une perte nette pour la société. Il va encore plus loin en tentant de déterminer le niveau moyen du coût marginal du lobbying (c’est à dire en fait du volume total des activités de lobbying) qui maximise la création de valeur en découlant pour la société. Il se base sur l’hypothèse qu’une situation optimale serait celle où les activités étatiques seraient toutes efficientes et le lobbying inutile, mais que celle-ci n’existe pas en information imparfaite. Il recherche donc une solution dite de « second best ». L’idée générale est que l’on peut déterminer un coût optimal entre un coût très élevé qui sera prohibitif même si l’existence de la rente est créatrice de valeur, et un coût très faible si les activités de l’État étaient quasiment efficientes. De manière plus large, le lobbying peut être considéré comme le moyen d’aider les entreprises à naviguer dans un environnement de plus en plus soumis aux normes, une stratégie proactive destinée à transformer les contraintes normatives en opportunités (Bessire, Cappelletti et Pigé, 2010). Dans ce cadre socio-économique, le lobbying aura quatre grands champs d’action (la « tétranormalisation », Savall et Zaradet, 2005) : les normes comptables et financières, la régulation commerciale, les normes sociales ainsi que les normes sur la qualité et l’environnement.

A ce questionnement économique et social sur le lobbying répond une interrogation interne à l’entreprise : quelle éthique pour cette activité ? Quelques -trop rares- articles de recherche alimentent cette problématique d’une réflexion essentiellement théorique. Ces travaux sont essentiellement américains et sont souvent descriptifs sans pour autant être ancrés dans un terrain particulier. Keffer et Hill (1997) se questionnent sur les effets du lobbying sur les citoyens (externalités), et sur le poids des arguments lobbyistes dans la balance des législateurs. Pour Hamilton et Hoche (1997), “business lobbying is a socially responsible activity which needs to be restrained by ethical standards” (p 118). Le droit américain en matière de lobbying serait très lâche. Il faudrait donc fixer des limites morales à cette activité (Ostas, 2007). Plus précisément, pour Barker (2008) le problème éthique se pose lorsque le lobbyiste risque de promouvoir une politique qui va enrichir son client au détriment des citoyens.
Très récemment, le développement des travaux autour de la responsabilité sociale de l’entreprise donne une actualité nouvelle au thème de l’éthique du lobbying (Néron, 2010). Ainsi pour Weyzig (2009), des activités avec un impact potentiel large comme la corruption ou le lobbying devraient avoir une place plus importante dans l’agenda de la responsabilité sociale des entreprises. Certains questionnements peuvent être plus radicaux : la recherche de rente par le lobbying est-elle compatible avec la responsabilité sociale de l’entreprise (Boatright, 2009) ?
Des cadres théoriques de l’éthique sont examinés par ces différents auteurs pour concevoir ce qui pourrait être utilisé pour penser et évaluer les activités de lobbying.

2. Quel cadre éthique pour penser le lobbying ?

1. La littérature liant éthique et lobbying propose une approche essentiellement normative (Oberman, 2004)

Keffer et Hill (1997), reprenant les travaux d’Etzioni (1993) suggèrent l’application d’une éthique communautariste au lobbying, où la satisfaction de tous les intérêts serait un élément de développement démocratique (Keffer et Hill, 1995), nommé pluralisme. Etzioni (1993) identifie cependant deux types de pluralisme : un pluralisme démesuré et malsain (unbounded and unwholesome) et le pluralisme dans l’unité. Ce dernier encourage la concurrence mais avec la prise en compte des intérêts communs de toutes les parties prenantes. Pour Hamilton et Hoche (1997), c’est d’avantage l’utilitarisme de Kant qu’il convient de mobiliser : un lobbying éthique serait une action qui maximise les gains en minimisant les pertes pour les autres. Ces auteurs établissent la possibilité conceptuelle d’un lobbying éthique et insistent sur la nécessité d’informer toutes les parties prenantes : presse consommateurs, fonds de pension, autres groupes de pression…
De manière plus récente, le cadre théorique de la responsabilité sociale de l’entreprise est souvent évoqué au sujet de l’éthique du lobbying (Barker, 2008 ; Boatright, 2009). Un lobbying socialement responsable consisterait à créer des activités socialement bénéfiques mais aussi à éviter les activités génératrices d’externalités négatives. Boatright (2009) propose lui un raisonnement économique basé sur un « marché de la morale » (Dunfee, 1990) dans lequel les individus exprimeraient leurs préférences morales. C’est le soutien apporté au lobbying dans ce type de marché qui mesurerait l’aspect socialement responsable de la pratique. Ce dernier article entérine plus précisément la nécessité de jugements normatifs sur le lobbying, rejoignant Néron (2009) pour qui l’interférence croissante de l’entreprise dans le processus politique justifie le développement d’une théorie normative du lobbying.
De facto, la littérature sur les rapports entre éthique et lobbying aboutit souvent à l’établissement d’une grille de critères d’un lobbying éthique. Oberman (2004) dresse l’un des premiers tableaux des critères d’une action politique éthique qui pose neuf questions clés au lobbyiste. Barker (2008) interroge l’éthique au regard de trois standards : légal, éthique et « admirable ».
De manière plus détaillée, Hamilton et Hoche (1997) proposent une liste de huit critères à respecter « 1. Maximiser le bien et minimiser les externalités négatives ; 2. Ne jamais faire d’exceptions ; 3. Laisser les autres responsables de leurs choix ; 4. Utiliser le test de la publication ; 5. Respecter les droits de l’homme ; 6. S’assurer d’une bonne distribution des bénéfices et des coûts ; 7. Honorer le contrat social ; 8. Agir en accord avec sa personnalité et la culture de son entreprise», p. 122.
Ostas (2007) quant à lui nous met sur la trace du code éthique de l’American League of Lobbyists (ALL) existant depuis 1979[3] : « 1. Honnêteté et intégrité ; 2. Conformité aux lois, règlement et règles applicables; 3. Professionnalisme ; 4. Conflits d’intérêts ; 5. Diligence et efforts ; 6. Conditions de rémunération et d’engagement ; 7. Confidentialité ; 8. Information et éducation du public ; 9. Respect des institutions gouvernementales ».
L’étude la plus connue sur le sujet demeure celle du « Woodstock Theological center » de l’université américaine de Georgetown, publiée en 2002. Elle propose sept principes à appliquer pour un lobbying éthique : « 1. Prendre en compte le bien commun et pas seulement une vue étriquée des seuls intérêts particuliers du client ; 2. La relation avec le client doit être basée sur la franchise et le respect mutuel ; 3. Fournir au décideur public une information juste et vérifiable sur l’identité du client et sur la nature et les conséquences des questions abordées ; 4. Dans son dialogue avec d’autres parties prenantes qui influencent l’opinion publique, le lobbyiste ne doit pas cacher l’identité de son client ou d’autres informations pertinentes ; 5. Éviter les conflits d’intérêts ; 6. Certaines tactiques sont inappropriées pour le lobbying ; 7. Le lobbyiste a l’obligation de promouvoir l’intégrité de la profession et la compréhension du public sur le processus de lobbying ».
Ces différentes grilles de critères couvrent principalement des prescriptions générales et de bon sens autour des notions de : conformité aux lois et aux règlements (promesse minimale), honnêteté et intégrité (discours incantatoire peu pragmatique) mais également conscience vis-à-vis des parties prenantes internes (professionnalisme, conflits d’intérêt) et engagement envers les parties prenantes externes (transparence, partage d’information).

2. La littérature plus générale sur l’éthique permet davantage de penser les processus
Notons dès à présent que nous avons choisi dans ce travail de ne pas distinguer éthique et déontologie car les deux termes sont utilisés indifféremment par les acteurs de terrain. Portant, comme le soulignent Issac et Mercier (2000), les deux termes ne recouvrent pas ne théorie la même réalité. « Les codes de déontologie constituent un ensemble de règles dont se dote la profession » ; « le code éthique formalise les valeurs, principes et règles de conduite d’une entreprise » (Isaac et Mercier, 2000, p.3)
Le chemin de l’éthique et de la déontologie pour développer une profession structurée et règlementée
Le constat lors des scandales d’Enron ou de Worldcom des dérives éthiques de diplômés des plus grandes écoles de management ont interpelé des chercheurs sur l’intérêt d’une charte déontologique du management (Nohriah & Khurana, 2008). Un tel cadre existe dans les professions réglementées régies par des codes déontologiques. Le respect de ces codes est symbolisé par le prêt du serment d’Hippocrate pour les médecins, de Galien pour les pharmaciens (d’autres pour les avocats, juges, postiers, etc.). La question qui nous préoccupe ici est le rôle que peut jouer l’établissement d’une déontologie, d’une éthique professionnelle comme élément structurant d’une profession. Dans l’exemple du serment d’Hippocrate, bien que celui-ci n’ait aucune valeur juridique, le Code de déontologie émis en France par le conseil national de l'ordre des médecins en est directement inspiré, et constitue de fait un chapitre du Code de la Santé Publique.
Une déontologie ou un code de conduite sont-ils des manifestations de la maturité d’une profession ou peuvent-ils être des outils pour développer une profession émergente vers une profession établie ?
La genèse d’une charte déontologique professionnelle : l’impact de l’exemple
La recherche sur le leadership charismatique (Weber, 1947 ; House & Baetz, 1979 ; Bass 1985) et transformationnel (Burns, 1978 ; Bass et Avolio, 1993), identifie l’impact de l’exemplarité du leader sur les collaborateurs sous le terme de ‘role model’. Elle permettrait de ‘montrer la voie’, de générer le changement collectif par l’exemple comportemental du leader. En l’absence de cadre établi ou en périodes d’instabilité, les individus cherchent l’engagement de personnages déterminants comme repères (Shapiro, 1995 ; Morgan, 1998 ; Simons, 2002, Melkonian, 2006). Pour Hirèche (2004), qui étudie l’impact du comportement éthique des dirigeants, l’exemplarité représenterait ce que Dherse et Minguet (1998) appellent l’«éthique incarnée : dans des cas de mise en place de politiques éthiques, les subordonnés reproduisent plutôt l’exemple de leurs superviseurs que d’adhérer à la politique d’entreprise.
Le concept de justice organisationnelle (Folger and Cropanzano, 1998) quant à lui se manifeste à trois niveaux. La dimension distributive se préoccupe de la perception d’équité de traitement, la dimension procédurale, de l’application de processus établis, et la dimension interactionnelle, de la qualité des rapports interpersonnels lors de l’application des processus. Dans le cas du leadership éthique, Moorman (1991) démontre que de ces trois dimensions, la justice interactionnelle contribue le plus à influencer l’engagement des individus.

2. MÉTHODE ET TERRAIN : UNE APPROCHE QUALITATIVE EXPLORATOIRE DE LA PROFESSION DE CONSEIL EN LOBBYING EN FRANCE

1. Quelques éléments sur le terrain : La France, un pays traditionnellement peu favorable au lobbying

Les règles concernant les groupes de pression sont essentiellement des lois qui découlent d’une coutume : dans les pays anglo-saxons traditionnellement favorables à la défense des intérêts particuliers, le lobbying des différentes parties prenantes est reconnu et encadré ; il n’en va pas de même dans des pays comme la France qui mettent traditionnellement en avant l’intérêt général. Il est à noter que le traitement des groupes de pression par la Communauté Européenne se rapproche du modèle anglo-saxon.
Les pays anglo-saxons tirent leurs racines de la philosophie britannique. La philosophie britannique en matière de lobbying est davantage dominée par l’idée de Bentham : L’État, pour définir l’intérêt public, doit prendre en compte au maximum les demandes de chaque groupe dans la société et chercher à les satisfaire équitablement après les avoir écoutées. L’histoire du lobbying britannique s’est concrétisée par une réglementation particulière à la Chambre des Communes des groupes d’intérêt lobbyistes (fichiers, codes déontologiques) et surtout par la constitution d’intergroupes parlementaires en la matière. Les membres du Parlement pouvant être salariés de groupes économiques, ce statut offre de grandes possibilités aux lobbyistes. Selon la loi britannique, le député a une seule obligation de transparence, au travers d’une « déclaration annuelle d’intérêts » : le député élu par le peuple doit pouvoir représenter les intérêts particuliers et y consacrer une partie de son temps.
Aux États-Unis, dès 1787, la Constitution légitime les actions des groupes de pression. En effet, le premier amendement précise que « le congrès ne pourra voter aucune loi relative à l’établissement d’une religion, interdisant ou limitant la liberté de la presse, ou le droit des citoyens de se rassembler pacifiquement et d’adresser des pétitions au gouvernement pour une réparation de ses torts ». Par la suite, le droit du lobbying est affirmé par un arrêt de la Cour Suprême (affaire Cruikshank, 1876), qui considère que le droit de pétition est une conséquence directe du système démocratique. Le « lobbying Act » de 1946 confirme cet arrêt. En outre, la législation américaine permet le financement des campagnes électorales par les électeurs regroupés au sein des Political Action Committees (PAC). Nous avons vu précédemment que cette pratique était le vecteur essentiel de l’influence des entreprises aux États-Unis.
Comme aux États-Unis, la Communauté européenne reconnaît et légitime l’existence du lobbying. Ainsi, une communication intitulée « transparence dans la communauté » (JOCE, C 166, 1993) vise à favoriser le rapprochement du public et des institutions communautaires en particulier par la publication des documents d’intérêt public au Journal Officiel. Par ailleurs, la Commission a élaboré en 1997 à l’attention du Conseil et du Parlement une communication sur « la politique anti-corruption de l’Union » (corruption des fonctionnaires comme celle des lobbyistes). Plus directement, la Commission a défini un cadre au lobbying par l’importante communication du 2 décembre 1992 : « un dialogue ouvert et structuré entre la communauté et les groupes d’intérêt » (JOCE, C 63 5.3.93). En juin 2011, le Parlement et la Commission européenne ont créé un registre de transparence (sur les lobbyistes européens) public et commun qui donne plus d’information que ceux des deux institutions qui existaient séparément depuis 2008. Ces registres comptaient déjà environ 4000 organisations différentes avant leur modification, dont un peu moins de 300 cabinets de consultants.

A l’opposé, la France n’est pas un pays de tradition lobbyiste. Jean-Jacques Rousseau dans son Contrat Social[4] condamne tout groupe intermédiaire, écrivant par exemple : « il importe donc pour avoir bien l’énoncé de la volonté générale qu’il n’y ait pas de société partielle dans l’état et que chaque citoyen n’opine que d’après lui ». Cette approche est partagée par la plupart des philosophes des lumières et se nourrit de l’observation des guildes et des corporations oppressives de l’Ancien Régime. La loi Le Chapelier de 1791 interdisait l’activité des groupes de pression. Avec la loi sur la liberté syndicale de 1884, ces groupes se sont réorganisés sous forme de syndicats. Cependant, ces syndicats officiels agissent simplement comme représentants des intérêts collectifs des adhérents et ne constituent pas des lobbies. Apparaissent alors des organisations professionnelles (plus de 1500 en France) qui revendiquent pour un secteur particulier. Finalement, le statut du lobbying s’est récemment développé en France. Pourtant, aucun texte législatif ou réglementaire ne s’en préoccupe directement. Il existe cependant d’autres sources qui encadrent de manière plus large l’activité d’influence des entreprises en France : le code pénal ainsi que les lois réglementant le financement de la vie politique. Les articles 432-11, 432-12 et 432-13 condamnent respectivement la corruption passive, la prise illégale d’intérêts et le trafic d’influence commis par des personnes exerçant une fonction publique. Les articles 433-1 et 433-2 portent de la même manière sur la corruption et le trafic d’influence commis par les particuliers
. Le financement de la vie politique est lui davantage réglementé qu’aux États-Unis. Les dépenses des partis politiques et des candidats aux élections n’étaient pas encadrées par un régime juridique précis de financement jusqu’en 1988. Cette lacune avait favorisé certaines dérives auxquelles le Parlement a entendu mettre un terme par une série de lois[5]. Parmi les différentes mesures instaurées par ces textes, les ressources des partis et des candidats sont entourées d'un certain nombre de garanties de transparence, de manière à éviter les financements occultes et les pressions des puissances financières. Dans cette optique, depuis 1995, les pouvoirs publics ont décidé de couper le cordon ombilical entre l'argent des entreprises et les caisses politiques, en interdisant définitivement aux personnes morales -quelles qu'elles soient- de prendre part au financement de la vie politique.
Aujourd’hui en France, le statut du lobbying change. La présidence de l’Assemblée Nationale a publié en novembre 2009 une liste des représentants d’intérêt autorisés à accéder au Palais Bourbon. En vertu du nouveau règlement de l’Assemblée Nationale, pour pouvoir figurer dans cette liste, les lobbyistes ont rempli un formulaire « donnant des informations sur leur activité et les intérêts qu’ils défendent ». La même démarche a été adoptée au Sénat en janvier 2010.

2. Quelques éléments sur la méthode : étude qualitative d’un cas élargie de manière exploratoire à la profession

En France, le conseil en lobbying est une profession émergente. C’est pourquoi, comme dans le cas du lobbying des associations étudié précédemment (XXXX, 2010), il nous a semblé judicieux de commencer l’investigation par une étude qualitative de nature exploratoire. Sur un sujet relativement similaire (« l’alerte éthique à la française »), Charreire Petit et Surply (2008, p. 117) se positionnent également dans le cadre d’une « analyse empirique continuellement locale » (Miles et Huberman, 2003, p. 264) puis d’une généralisation de nature analytique (Yin, 1990).

A l’exception de WTCGU (2002) et Barker (2008), peu d’études de terrain ont déjà été menées sur le thème « Éthique et lobbying ». WTCGU (2002) porte sur la profession en général et été construite sur des interviews et des « focus group » pendant trois ans. Barker (2008) traite du lobbying des courtiers en immobilier américain. Il s’agit en réalité d’un modèle économique de type « offre et demande », qui étudie les effets de la formation et de l’expérience des brokers sur leurs dépenses, leurs revenus et la qualité des services offerts. Ces deux travaux de nature très différente aboutissent à des résultats de type quantitatif, prescriptif dans le premiers cas et descriptif dans le second.

La présente recherche s’est donc volontairement positionnée dans une perspective méthodologique autre : une approche qualitative et une exploitation analytique.
Une observation participante (non masquée) a été menée dans un cabinet de conseil en lobbying sur trois mois en 2011 par un chercheur. Durant cette période, dix entretiens non directifs formels de deux heures chacun ont été enregistrés et retranscrits (cf annexe 1). Les deux premiers ont été menés par deux chercheurs dans l’environnement du cabinet de lobbying choisi comme terrain : l’un dans un ministère en prise avec les problématiques d’éthique professionnelle, l’autre dans une entreprise de notation sociétale évaluant la transparence des activités de lobbying. Il s’agit en somme d’entretiens d’experts. Les huit autres interviews se sont déroulées au sein du cabinet de lobbying. Pour des raisons de confidentialité, le nom de ce cabinet (que nous appellerons « CEL » comme Conseil En Lobbying), de ses consultants et de ses clients ne seront pas communiqués. CEL est un cabinet de lobbying parisien fondé en 2001 et qui emploie 17 personnes. Il nous a été possible de rencontrer à plusieurs reprises le dirigeant de ce cabinet et d’interviewer également cinq de ses consultants ainsi que deux de ses managers opérationnels (organisation et informatique). Par ailleurs, deux types de documents internes au cabinet CEL ont été d’un intérêt particulier : - d’une part, un référentiel éthique (cf annexe 2) dit de « lobbying responsable » a été étudié et retravaillé en collaboration avec les consultants de CEL (lors de deux réunions d’échange) ; - d’autre part, 18 dossiers clients confidentiels de CEL (soit 38,6 % de son chiffre d’affaires) ont mis à notre disposition. Ces dossiers portaient majoritairement sur des actions de lobbying effectuées en 2011 et occasionnellement en 2010.

Nous n’avons pas souhaité coder les discours mais les avons utilisés pour construire le récit des cas. Les verbatim présentés par la suite constituent donc des éléments particulièrement remarquables aux yeux du chercheur et illustrent des éléments clés du cas. La fonction de la personne interviewée est citée entre parenthèse. De manière à améliorer la validité de cette approche qualitative, nous avons établi des triangulations en recoupant et complétant les informations données par les interviews, par des sources de données : - internes (lettres aux parlementaires, plaquettes d’information publique, notes internes, communiqués de presse et autres documents fournis par nos interlocuteurs) ; - externes (les sites internet de l’association professionnelle française des conseils en lobbying ainsi que ceux des concurrents de CEL, du Sénat et de l’Assemblée Nationale, du Parlement et de la Commission européens).
Concernant la profession, c’est l’Association Française des Conseils en Lobbying (AFCL) créée en 1991 qui a été plus particulièrement étudiée. Elle regroupe des cabinets consacrés uniquement à l’action politique et compte 26 membres en 2012 (dont le cabinet CEL). Elle a produit une Charte relative à l’exercice de la profession de conseil en lobbying qui débute par la définition suivante : « Le conseil en lobbying représente les intérêts et défend les droits des individus, entreprises, associations, groupements ou collectivités, à travers une information rigoureuse, auprès d’organismes privés ou publics susceptibles de prendre des décisions affectant ces intérêts ou ces droits ». D’autres réseaux existent de manière plus diffuse et ont été également mobilisés comme par exemple l’association BASE créée en 2004 et qui regroupe plutôt de jeunes lobbyistes, qu’ils travaillent en cabinets ou en entreprises.

3. RÉSULTATS ET INTERPRÉTATION : COMMENT ET POURQUOI L’ÉTHIQUE S’INVITE-T-ELLE DANS LA PROFESSION DE CONSEIL EN LOBBYING ?

Cette recherche nous a permis dans un premier temps d’observer différentes pratiques d’éthique dans le conseil en lobbying, en partant du cas de CEL pour ouvrir sur la profession en France, voire en Europe et aux États-Unis. Dans un second temps, nous nous sommes interrogés sur les implications de cette éthique d’un lobbying responsable.

2. 1. Une approche descriptive : Quelles pratiques de l’éthique dans le conseil en lobbying ?

1. En France : une éthique de l’exemplarité
L’étude du cas CEL ainsi que le recueil de données secondaires sur la profession de conseil en lobbying en France nous permettent de dresser un premier constat. L’accord de base entre les différents professionnels ne va guère plus loin que le respect de la loi. La charte de déontologie de l’AFCL [6] n’est accompagnée d’aucune sanction. Elle est structurée autour du respect du code pénal et des lois sur le financement politique, décrits précédemment, ainsi que des règlements des différentes assemblées françaises et européennes. La définition de la « probité professionnelle » par l’AFCL ne reflète que le simple respect du droit, qui correspond au standard « légal » de Barker (2008). La régulation de la profession semble effectivement bien limitée. Nous sommes par ailleurs dans le cadre d’une profession faiblement institutionnalisée et toujours suspecte : « Je ne vois pas trop comment on va vérifier, à moins d’être sur le dos des lobbyistes en permanence. Comment prouver qu’il n’y a pas de valises de billets qui se baladent ? On peut envisager ce qui se fait aux États-Unis, c’est-à-dire une déclaration en tant que lobbyiste, pour qu’il y ait plus de transparence. Mais le reste, c’est difficile. » (EC Ministère) Le cabinet CEL souhaite aller plus loin pour établir un « référentiel de lobbying responsable » (cf annexe 2). Les pré-requis minimes de la profession en termes du respect de la loi y sont présents. Des éléments relevant davantage de l’éthique au sens de Barker y figurent également : « le dialogue », « la transparence » et la « déontologie » qui qualifient neuf des quinze indicateurs du référentiel de lobbying responsable de CEL ne sont pas sans rappeler la transparence, le partage d’information et l’intégrité relevé dans la littérature sur le sujet (Hamilton et Hoche, 1997 ; Ostas, 2007 ; WTCGU, 2002). Deux indicateurs du lobbying responsable de CEL, « la responsabilité individuelle » et « la responsabilité organisationnelle » sont même dans le registre de « l’admirable » au sens de Barker. Dans la pratique, le premier item signifie que sur des sujets sensibles, les consultants se laissent le temps de la réflexion. « J’ai déjà refusé des missions qui n’étaient pas compatibles avec mon éthique comme par exemple le travail qu’un alcoolier voulait réaliser sur les soirées étudiantes » (consultant CEL). Il va sans dire que ces prises de position ne peuvent intervenir que si le PDG du conseil en lobbying les considère de manière bienveillante, ce qui est le cas chez CEL. Le second item implique d’ailleurs davantage le PDG qui imprime sa marque sur « l’organisation responsable » : « Les raisonnements sont bâtis dans une perspective d’intérêt général ; il en va de même des propositions d’amendements ; CEL peut être amené à faire évoluer le discours du client dans ce sens ». (PDG CEL) Comment est-ce possible ? Plus âgé que l’ensemble de ses salariés, le PDG de CEL a une expérience de trente ans en politique et de vingt ans en lobbying. A cette légitimité par les compétences, s’ajoute une légitimité charismatique forte (Weber, 1947) liée au personnage.
Aller au-delà de la faible régulation de la profession en France suppose donc de fortes convictions personnelles chez un leader dominant comme il est possible de l’observer chez CEL. Nous retrouvons bien là les traits de l’éthique de l’exemplarité développée précédemment (Bandura, 1986 ; Warnick, 2008 ; Brasseur et Magnien, 2009).
Pour autant, le PDG de CEL, pourtant en responsabilité au sein de l’AFCL n’est jamais parvenu à imposer son point de vue à la profession: « Je préfère m’exprimer en mon nom plutôt qu’en qualité de représentant de l’AFCL car mon opinion n’est pas partagée par tous et ne fait pas l’objet d’un consensus » (PDG CEL).

2. Aux États-Unis et en Europe : du respect des procédures à l’éthique interpersonnelle
Comme nous l’avons vu précédemment dans cette communication, contrairement à la France, les États-Unis et l’Europe reconnaissent le lobbying ; cette activité y est institutionnalisée.
Pour autant, la pratique de l’éthique y est-elle similaire ? Dans le cas américain, le lobbying date de plusieurs siècles. Il a été règlementé progressivement, d’abord par la jurisprudence puis par des lois et fait l’objet de procédures et enregistrements détaillés. L’étendue et la profondeur des données publiquement consultables qui en découlent (voir par exemple le site opensecrets.org) démontrent le potentiel régulatoire certain de ces mesures.
Au contraire, en Europe, le lobbying auprès du Parlement et de la Commission est une activité qui date seulement d’une vingtaine d’années. Longtemps, la pratique éthique européenne a été celle d’une régulation forte mais informelle. Un registre des groupes d’intérêts n’a été créé dans les deux institutions qu’il y a quatre ans et il demeure facultatif. En 2010 une étude publiée par ALTER EU[7] (Alliance pour une Règlementation de Transparence et d’Éthique en matière de Lobbying) révélait que 60% des agences de lobbying de l’UE n’étaient pas inscrites au registre européen. Des questions parlementaires sont posées régulièrement à la Commission sur la nécessité d’une inscription obligatoire au registre ainsi que sur la possibilité d’une formalisation plus importante des garanties de l’éthique du lobbying. La réponse donnée par Mr. José Manuel Barrosso au nom de la Commission réaffirme une pratique de l’éthique bien différente : « La Commission exerce divers pouvoirs qui lui sont conférés par le Traité, qui requièrent des interactions avec des parties prenantes, et se trouve sous une obligation du Traité de mener des consultations étendues avant d’initier une législation. C’est pourquoi la Commission considère que la rencontre de représentants de groupes qui n’ont pas signé le registre ne peut être sujette à une décision de principe, telle que suggérée […], qui serait systématiquement appliquée à tous. Cela requiert un jugement au cas par cas qui dépend des objectifs de la réunion en question. Le registre de représentants d’intérêts est un registre facultatif et ne correspond pas à un système d’accréditation. Il revient donc à chaque lobbyiste ou consultant de décider de s’enregistrer ou pas. La Commission continue à promouvoir le registre et constate avec satisfaction l’augmentation des enregistrements. » [8] .
Il semblerait donc qu’au niveau Européen, le cadre de la pratique du lobbying intègre bien l’importance des parties prenantes dans l’optique de la RSE (Néron, 2010), comparable à l’approche constitutionnelle américaine de consultation de tout citoyen. En revanche, la pratique obéit à des procédures moins formelles qu’aux USA et le poids du jugement interpersonnel prime.
Le cas québécois a été considéré dans notre analyse car il nous semblait pouvoir illustrer le cas où le lobbying est une profession ancienne mais faiblement institutionnalisée. Nous avons pu notamment consulter les sites internet gouvernementaux et la presse québécoise à ce sujet. Cette dernière met en exergue régulièrement des cas de corruption associés au lobbying. Pourtant, il existe depuis 2002 une loi sur la transparence et l’éthique en matière de « lobbyisme » (terminologie canadienne) qui définit notamment « le lobbyiste conseil comme toute personne, salariée ou non, dont l’occupation ou le mandat consiste en tout ou partie à exercer des activités de lobbyisme pour le compte d’autrui moyennant contrepartie »[9]. Cette loi prévoit notamment l’obligation de l’inscription sur un registre ainsi que le respect d’un code de déontologie sous peine de sanctions. Le code déontologie des lobbyistes québécois date de 2004 ce qui est très récent au regard de l’histoire du lobbying. Il énonce des valeurs très générales, faiblement régulatrices, comme « le respect des institutions », « l’honnêteté », « l’intégrité » et le « professionnalisme ».

Au final, comme résumé ci-dessous, l’âge de la profession (établie vs. émergente) influencerait le degré de formalisation de l’éthique du conseil en lobbying, alors que sa reconnaissance (institutionnalisation) permettrait une régulation plus ou moins forte. Matrice des pratiques de l’éthique du conseil en lobbying
| |Profession établie |Profession émergente |
|Profession reconnue |Cas américain : |Cas européen : |
|(institutionnalisée) |Respect de procédures anciennes |Respect du jugement interpersonnel |
| |Régulation forte |Régulation forte |
| |Éthique formelle |Éthique informelle |
|Profession peu reconnue |Cas québécois : |Cas français : |
|(faiblement |Respect de procédures nouvelles |Respect de l’exemplarité (chez CEL) |
|institutionnalisée) |Régulation faible |Régulation faible |
| |Éthique formelle |Éthique informelle |

D’après cette matrice, le niveau de reconnaissance du lobbying et de son institutionnalisation correspondrait aussi à des éléments culturels (anglo-saxon vs. latin) alors que la formalisation de son éthique dépendrait de la géographie (Europe vs. Amérique du Nord).

2. Une approche analytique : Quels enjeux autour de l’éthique pour les cabinets de conseil en lobbying ?

Cette partie est davantage exploratoire que la partie précédente. Elle a surtout pour fonction de poser des jalons pour des recherches futures.

1. Au sein des cabinets de conseil : la recherche d’une éthique du lobbying comme élément de structuration interne Comme dans d’autres professions, le respect de l’éthique permet de structurer les cabinets de conseil, au sein de chaque cabinet ainsi que dans les relations qu’ils entretiennent entre eux. Au sein de CEL, le respect du code de lobbying responsable permet une « professionnalisation de la démarche » et donc un meilleur contrôle sur l’ensemble des salariés. Un certain nombre de procédures sont notamment mises en place, comme par exemple celle concernant l’organisation de tables rondes avec des élus sur un sujet : « deux étapes doivent être respectées avant l’envoi des invitations, ensuite la procédure est très stricte, c’est le client qui appose sa signature avec son entête » (opérationnel CEL). Par ailleurs, le recours à la centralisation systématique des données sur une base informatisée déclarée à la CNIL[10] participe également à la structuration du cabinet. Au-delà d’une meilleure performance de l’organisation, le but recherché est une objectivisation et rationalisation des décisions « la cartographie des élus et de leurs centres d’intérêts nous donne automatiquement la liste des personnes à inviter », (opérationnel CEL). Au sein de la profession de conseil en lobbying elle-même, le code de déontologie minimal suivi à l’AFCL, à l’Assemblée Nationale et au Sénat permet de fixer quelques règles de bon sens et de spécifier quelques éléments factuels. On en voudra pour preuve la précision des lieux cités dans cet extrait du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale française. « Les représentants d'intérêts publics ou privés figurant sur une liste fixée par le Bureau ou sa délégation compétente, et rendue publique, bénéficient, à leur demande, de badges valables une journée donnant accès à la grande Rotonde, au salon de la paix et à la salle des Quatre colonnes, sauf pour cette salle les mardis et mercredis, une heure avant l'ouverture de la séance de l'après-midi et jusqu'à une demi-heure après la fin des questions au gouvernement ou d’un vote par scrutin public en application de l’article 65-1 du Règlement. Pour pouvoir figurer sur cette liste, les représentants d'intérêts s'engagent à respecter le code de conduite les concernant adopté par le Bureau.»[11]
Des acteurs proactifs de la profession, comme semblent l’être le cabinet CEL ou encore l’association de jeunes lobbyistes BASE, veulent aller plus loin dans cette structuration par l’éthique. Ne pourrait-on pas les envisager comme des entrepreneurs institutionnels au sens de Di Maggio (1988), à savoir des individus ou des organisations qui créent des normes cohérentes avec leur identité et leurs intérêts puis les établissent comme des standards légitimes. « En France, c’est plus naissant. Et vis-à-vis des pouvoirs publics, c’est à ça que peut nous servir la RSE, à avoir des entrepreneurs proactifs par rapport à la réglementation, à ne pas être dans la peur du gendarme. Les entreprises allemandes ne marchent pas comme ça, dans la peur du gendarme. » (EC Ministère)

2. L’éthique du conseil en lobbying comme éléments de structuration externe : des relations clarifiées avec les autres parties prenantes
Pour reprendre les termes d’Isaac et Mercier (2000), « le recours à la formalisation d’une éthique ou d’une déontologie peut être appréhendé comme un outil de régulation des relations entre l’organisation et ses différentes parties prenantes » (p.3).
Cet enjeu de l’éthique est particulièrement important pour les cabinets de conseil en lobbying.
Trois types de parties prenantes sont régulièrement évoquées à l’écrit comme à l’oral au sein de cette profession : l’État, les clients, la société civile.
Le respect du client semble aller de soi dans une démarche commerciale. Portant un certain nombre de dilemmes vont se poser au cabinet de lobbying : que faire en cas de conflit d’intérêts entre deux dossiers clients ? Comment articuler le principe de confidentialité des questions traitées et l’obligation de transparence des différents registres officiels de lobbyistes ? Jusqu’où aller pour satisfaire les exigences d’un client ? Le cabinet CEL répond à l’ensemble de ces questions par certaines des règles de son référentiel lobbying responsable ce qui permet de fixer des limites pérennes dans le temps avec une partie prenante potentiellement envahissante.
Nous appelons État l’ensemble des décideurs publics considérés comme des cibles d’influence potentielles par les cabinets de lobbying. A ce sujet, la séparation des intérêts publics et privés qui correspond le plus souvent au simple respect de la loi en vigueur est adoptée par les cabinets de conseil en lobbying. Il est possible d’aller plus loin comme CEL qui affirme respecter le « temps politique » et notamment « s’interdire d’intervenir à partir du moment où la décision finale est dans les mains du décideur public » (PDG CEL). Une telle limite est-elle appliquée et applicable dans la réalité ?
La société civile regroupe l’ensemble des individus ou des organisations susceptibles d’être impactés par les activités de lobbying des cabinets. Pour Fouad Benseddik, directeur des méthodes et des relations institutionnelles de Vigeo[12], les choses sont relativement claires : « nous avons créé un critère « transparence et intégrité des stratégies et des pratiques d’influence » qui est scoré sur internet et les rapports annuels des entreprises. Tout ce qui est fait doit être disponible pour l’information du public ». CEL définit quant à lui un critère appelé « prise en compte de toutes les parties prenantes » : « Le dialogue doit permettre l’expression de toutes les parties prenantes concernées sans exclusive, comme les acteurs institutionnels présents sur le territoire, les ONG, les associations de consommateurs et autres relais d’opinion » (consultant CEL). Force est de constater que dans la pratique par manque de temps et de moyen une telle consultation est rarement mise en place.
Le schéma ci-dessous résume les enjeux internes et externes de l’éthique pour du conseil en lobbying observés dans notre étude.

0Les enjeux de l’éthique pour le conseil en lobbying

CONCLUSION

En conclusion, cette recherche exploratoire centrée principalement sur le cas des cabinets français de conseil en lobbying nous a permis de mettre en lumière deux types de résultats : - La pratique de l’éthique dans les cabinets de lobbying est différente suivant l’âge et le degré d’institutionnalisation de la profession, et ceci au sein d’un environnement socioculturel donné. L’ancienneté de la profession engendre une formalisation de l’éthique, comme aux États-Unis ou au Québec, qui n’existe pas lorsque le métier est plus récent, en Europe et plus particulièrement en France. Par ailleurs un conseil en lobbying fortement institutionnalisé se régule plus fortement. Pour autant, chaque cas présente une pratique de l’éthique qui lui est propre, allant du respect des procédures éthiques, au jugement interpersonnel, en passant par la nature normative de l’exemplarité. - Les enjeux de l’éthique du conseil en lobbying sont une double structuration : de la profession elle-même et des relations entre ces organisations et leurs différentes parties prenantes (clients, États et société civile notamment).

Cette question de l’éthique du lobbying apparait comme l’un des piliers de l’agenda de recherche sur la responsabilité sociale des entreprises, dans le cadre des relations entre les institutions publiques et privées. Elle suggère des opportunités de recherche future sur les principes et les procédures éthiques appliqués au lobbying comme instrument de légitimation et de diffusion de bonnes pratiques.

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ANNEXES 1. Liste des personnes interviewées

- EC Ministère : Eric Corbel, chef du Bureau de la consommation et de la production responsables, Ministère de l'Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, Commissariat général au développement durable ; - FB Vigeo : Fouad Benseddik, directeur des méthodes et des relations institutionnelles de Vigeo interrogé sur le critère « transparence et intégrité des stratégies et des pratiques d’influence ; - CEL (anonymé pour des raisons de confidentialité) : PDG, 5 consultants, 2 opérationnels

2. Référentiel du « lobbying responsable » de CEL

| |A. Démocratie |B. Dialogue |C. Transparence |D. Déontologie |E. Responsabilité |
| |(respect des usages en | | | | |
| |vigueur) | | | | |
|Indicateur 1 |Respect des assemblées |Partage d’information |Transparence sur le |Invitations utiles et |Responsabilité |
| | | |mandant |limitées |individuelle |
|Indicateur 2 |Respect du temps |Prise en compte de |Transparence sur |Refus de la pression |Responsabilité de |
| |politique |toutes les parties |l’expertise | |l’organisation lobbyiste|
| | |prenantes | | | |
|Indicateur 3 |Séparation des intérêts |Objectivité et équité |Transparence sur les |Circulation de |Professionnalisation de |
| |publics et privés |du débat |actions et les |l’information |la démarche |
| | | |positions |officielle | |

-----------------------
[1] Rapport Transparence International France: Influence à l’Assemblée Nationale, améliorer la transparence Mars 2011, Paris.
[2] la loi sur le contrôle de la production laitière débattue par la commission de l’agriculture en 1982, la loi sur le partenariat pour les stages en entreprise en charge de la commission de l’éducation et du travail en 1982 et la loi sur la politique en faveur du marché du gaz naturel étudiée par la commission de l’énergie et du commerce entre 1983 et 1984
[3] http://www.alldc.org/ethicscode.cfm
[4] Rousseau J.J., 1762, Du Contrat Social, Livre II, Chapitre 3, p. 95, Bordas, Paris, 1985.
[5] loi organique et loi ordinaire du 11 mars 1988 relatives au financement de la vie politique ; loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques ; loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques ; loi du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique
[6] http://afcl.net
[7] http://www.alter-eu.org
[8] http://www.europa.eu/transparency-register
[9] http://www.commissairelobby.qc.ca
[10] Commission Nationale Informatique et Libertés
[11] http://www.assemblee-nationale.fr/representants-interets : Article 26, paragraphe III-B de l’Instruction générale du Bureau adopté le 2 juillet 2009 et modifié le 24 février 2010
[12] Société française experte de l’analyse, de la notation et de l’audit-conseil des organisations, s’agissant de leurs démarches, pratiques et résultats liés aux enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance

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Cabinets de conseil en lobbying

Structuration interne

Société civile

Clients

État

Structuration externe

Parties prenantes

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...La responsabilité sociale des entreprises (R.S.E) [pic] Sommaire Introduction : I/ R.S.E. : place dans les différents domaines du management des entreprises : A/ Adaptation progressive du management à la R.S.E. : B/ Stratégie de l’entreprise : Domaine du base de management : C/ Influence indirecte de la R.S.E. sur les autres domaines du management II/ Une approche « glocale » du management : A/ A travers les pays (type de pays) : B/ A travers les entreprises (types d’entreprises) : III/ La R.S.E., une bonne conscience pour les managers ? A/ Des obligations et des initiatives volontaires : B/ Un « effet de mode » : C/ R.S.E. : Moyen de valorisation pour l’entreprise : Conclusion : Annexes Sources : Introduction : L’apparition du concept de Responsabilité Sociale/Sociétale de l’Entreprise est récente ; elle est due à la nécessité de répondre aux nouvelles tendances sociales, environnementales et économiques de notre monde. En effet, ce dernier change non seulement d’un point de vue environnemental (le réchauffement climatique est la notion la plus évidente) mais nous devons faire face à de nouvelles préoccupations sociales et économiques. Ainsi, la R.S.E. se fonde sur « l’intégration volontaire des préoccupations sociales et environnementales des organismes à leurs activités économiques et à leurs relations avec les parties intéressées. »[1] Les entreprises se doivent donc d’avoir un comportement responsable...

Words: 8698 - Pages: 35

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L’éthique En Entreprise : Obstacle Ou Alibi ?

...dans l’univers des affaires fut considérée comme un questionnement extérieur à l’entreprise. Elle était alors vue comme un obstacle à sa finalité première, qui est de créer de la richesse, d’atteindre une efficacité économique. Cependant, doucement, avec les pressions des parties prenantes de plus en plus nombreuses et diversifiées, au fil des différentes crises sociales et économiques, ou de l’éclatement de l’Etat Providence, on a pu observer dans les entreprises, un glissement vers des considérations éthiques. Elles se sont ainsi positionnées, comme on peut parfois le lire ou l’entendre, en personnes morales. Ce déplacement des entreprises vers l’éthique - auparavant éthique de l’individu, désormais, éthique professionnelle ou éthique en entreprise - n’est pas sans poser de problèmes. Toute la difficulté réside dans l’application de la notion d’éthique, du domaine de l’homme, en tant qu’individu, au monde bien particulier de l’entreprise. Dans une « société de jugement », il devient impossible pour les entreprises, comme l’exprimait Nicole d’Almeida, de ne pas être à l’écoute du monde qui les entoure en général, et de leurs parties prenantes, en particulier. Qu’elle soit bien ou mal appréhendée, la notion d’éthique s’impose dans l’évolution de notre société, et s’est donc déplacée, tout naturellement, au sein des entreprises. En réalité, ce mouvement semble fort peu naturel et l’apparente contradiction entre éthique et entreprise ne cesse de soulever des questions : est-ce...

Words: 4853 - Pages: 20

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Abc Def Ghi Jkl Mno

...Accounting (DONE) | DEVC 31112: Les enjeux de l’economie sociale | ECOA 31129: Asian Economies | CPTC 31124: Informations Comptables et Financières (CORE) | DEVC 31114: Economie urbaine et régionale | ECOA 31157: Monnaie et banque | CPTC 21125: Financial Accounting and Reporting (CORE) | DEVC 31134: Etat et gouvernance | ECOA 31180: Macroéconomie: introduction | CPTC 31246: Analyse des états financiers | DEVC 31202: Les modes de gestion des collectives et des services urbains | ECOA 31203: Economie du travail | CPTC 31247: Financial Statement Analysis | DEVC 31204: Marketing urbain | ECOA 31205: Sustainable Energy Economics | CPTC 31254: Audit et Management | DEVC 31206: Strategie et management des organisations à finalité sociale | ECOA 31226: Analyse de conjoncture | CPTC 31261: IFRS – Investor Relations | DEVC 31208: Urbanisme et aménagement | ECOI 31080: Pre-MSc Microéconomie | CPTC 31265: Group Financial Statements | DEVC 31210: Responabilité sociale de l’entreprise et developpement durable | ECOI 31081: Pre-MSc Microeconomics | CPTC 31355: Strategic Business Analysis ad Value Creation | DEVC 31212: Politiques publiques locales | ECOI 31142: Economie managériale | CPTC 31484: Séminaire de recherche comptabilité financière | DEVC 31252: Droit de l’urbanisme, de l’immobilier, et de l’environnement | ECOI31143: Business Economics | CPTC 31485: Research Semoinar in Financial Accounting | DEVC 31402: Seminaire de chair entrepreneurait social | ECOI 31231:...

Words: 1807 - Pages: 8

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Joyue

...service de l’entrepreuneuriat social ACTUALITE Le Pr. Yunus remis en question au Bengladesh Rise up! - N°2 - Spécial ISEF Mars 2011 N°2 1 ’Entreprise est un outil formidable et innovant pour aider les exclus du système économique à s’insérer et s’intégrer dans la société. Cependant, toutes les entreprises ne se donnent pas les moyens d’assumer cette responsabilité sociétale. Develop agit pour promouvoir un modèle d’entreprises privées et responsables pour lesquelles le développement social est au moins aussi important que la rentabilité financière : ce modèle s’appelle Social Enterprise. Implantée à Lille comme à Nice et représentée par ses 45 L EDITO membres, dont 10 nationalités, Develop travaille à faire connaître l’entrepreneuriat social et à mettre en relation les différents acteurs économiques pour que se développent des pratiques d’entreprises plus responsables qui mettent l’humain au centre des préoccupations économiques. Dans cette optique Develop organise l’International Social Enterprise Forum 2011 (ISEF 2011) qui se tient à Nice le 25 mars. Ce Forum international rassemble des entreprises, des entrepreneurs, des personnalités de renom et des associations qui s’engagent concrètement pour une économie plus responsable et solidaire. Par la présence d’intervenants de qualité, soutenus par nos partenaires et sponsors, et grâce à votre participation, nous sommes confiants dans le succès de cette première édition de l’ISEF et dans la perennité de cet...

Words: 5694 - Pages: 23

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Business

...Warrant Centre de recherche Travail & Technologies Fondation Travail-Université (Namur) (*) 1. Objectifs et méthodologie La recherche vise à étudier les conditions dans lesquelles l’innovation technologique peut favoriser et promouvoir le développement durable. Elle prend en considération toutes les formes d’innovations technologiques potentiellement favorables au développement durable : innovations de procédé, innovations de produit, innovations organisationnelles, innovations de marché. Elle s’intéresse également à toute la chaîne de l’innovation et accorde une attention particulière à la pluralité des dispositifs d’innovation. La recherche poursuit cinq objectifs scientifiques, eux-mêmes guidés par des préoccupations opérationnelles : – étudier le rôle ambivalent de l’innovation technologique, analysée à la fois comme une des causes du développement non durable et comme un facteur clé d’un nouveau mode de production, compatible avec le développement durable ; – caractériser les technologies et les processus d’innovation favorables au développement durable, en tenant compte non seulement de leurs aspects environnementaux, mais aussi des autres dimensions du développement durable ; – étudier les aspects socio-économiques de ces technologies et processus d’innovation favorables au développement durable, à travers des études de cas ; – situer l’innovation technologique en relation avec d’autres instruments au service du développement durable ; – étudier les freins et les incitants...

Words: 6551 - Pages: 27

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Rapport Innovation

...UN PRINCIPE ET SEPT AMBITIONS POUR L’INNOVATION Commission sous la présidence d’Anne Lauvergeon 2 TABLE DES MATIÈRES _ SYNTHÈSE INTRODUCTION 1. 2025, UN CONTEXTE MONDIAL 2. FORCES ET FAIBLESSES DE LA FRANCE 3. CRÉER UN ENVIRONNEMENT PROPICE À L’INNOVATION 4. FAIRE DES CHOIX 5. PRINCIPES POUR UNE MISE EN ŒUVRE INNOVANTE SEPT AMBITIONS POUR LA FRANCE Ambition 1 : Le stockage de l’énergie Ambition 2 : Le recyclage des matières : métaux rares Ambition 3 : La valorisation des richesses marines : métaux et dessalement de l’eau de mer Ambition 4 : Les protéines végétales et la chimie du végétal Ambition 5 : La médecine individualisée Ambition 6 : La silver économie, l’innovation au service de la longévité Ambition 7 : La valorisation des données massives (Big Data) ANNEXES Annexe 1 : Lettre de mission de la Commission Annexe 2 : Composition de la Commission Annexe 3 : La démarche de choix de la Commission Annexe 4 : Premier soutien financier aux sept Ambitions : principes de mise en œuvre Annexe 5 : Personnes auditionnées, contributions reçues et principales sources de réflexion 4 8 9 11 13 15 18 20 20 23 25 28 33 37 41 46 47 49 50 52 54 3 SYNTHÈSE _ La Commission Innovation, composée de 20 personnalités aux profils variés, a été installée par le Président de la République le 18 avril 2013. Il lui a été demandé, par lettre de mission du Premier ministre, de sélectionner, en nombre limité, des ambitions fortes, reposant sur des innovations majeures, pour assurer...

Words: 23612 - Pages: 95

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Marly

...Marketing Résumé complet des chapitres 1 à 19 Année 2007-2008 Réalisé par Christopher B. EPHEC (Commerce Extérieur) 2 Marketing Chapitre 1 : Comprendre le marketing Notes originales rédigées par Christopher B. EPHEC 2007-2008 1. L’importance du marketing. Les responsables du marketing assument diverses tâches : - Recherchent et analysent, - Choisissent (définition des objectifs), - Agissent (actions sur le terrain), - Contrôlent (feed back) 2. Le rôle du marketing. a. Qu’est-ce que le marketing ? C’est un mécanisme économique et social par lequel individus et groupes vont satisfaire leurs besoins et désirs au moyen de l’échange et de la création de biens et services de valeurs. Le but du marketing est de rendre la vente superflue. Le client souhaite acheter le produit car il a été conçu pour répondre à ses attentes. Tout ce dont on a alors besoin est de rendre le produit disponible. b. Les échanges et transactions.  Échange : transfert d’une chose en contrepartie d’une autre.  Transaction : échange de valeurs entre au moins deux parties. On passe du marketing transactionnel au marketing relationnel lorsque les relations sont long termes. c. Sur quoi porte le marketing ?  Biens (café, eau -> dispo en magasin donc achat) ;  Services (coiffeurs, hôtels) ;  Idées (anti-tabac) ;  Informations (encyclopédie) ;  Propriétés (maison -> il y a eu un achat) ;  Endroits (villes qui font de la publicité pour attirer les touristes) ; ...

Words: 13793 - Pages: 56

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Operation Strategy Quality Measures

...The Role and Measurement of Quality in Competition Analysis 2013 The OECD Competition Committee discussed the role and measurement of quality in competition analysis in June 2013. This document contains an executive summary of that debate and the documents from the meeting: an analytical note by the OECD staff and written submissions: Australia, Canada, Chile, the European Union, Indonesia, Japan, Mexico, Portugal, United Kingdom, Ukraine, United States and BIAC. A note by Theodore Voorhees Jr. as well as a detailed summary of the discussion are also included. Competition policy is just as concerned with quality as it is with prices. While the importance of quality is undisputed and issues about quality are mentioned pervasively in competition agency guidelines and court decisions, there is no widely-agreed framework for analysing it which often renders its treatment superficial. There are a number of reasons why in practice, courts and competition authorities rarely analyse quality effects as rigorously as they analyse price effects. First, quality is a subjective concept and therefore much harder to define and measure than prices. In addition, microeconomic theory offers little help in predicting how changes in the level of competition in a market will affect quality and it is usually up to empirical analysis to determine how quality will change in response to varying degrees of competition in the context of particular markets. Given difficulties in terms of the evaluation...

Words: 125933 - Pages: 504